Substituer les produits dangereux

Sans analyse globale du problème et des conséquences de la substitution, un simple remplacement de produit conduira souvent à l’échec de la démarche ou à des solutions éphémères…

Interview
Joachim Edorh, Médecin du travail, Toxicologue - CMIE

"Préserver la santé des salariés"

Agir Mag. : En quoi consiste le processus de substitution d’une substance dangereuse ?
Joachim Edorh : La substitution consiste au terme d’une analyse globale, à remplacer une substance chimique dangereuse par une autre substance qui est moins ou pas du tout dangereuse. Elle s'inscrit dans une démarche prioritaire de prévention des risques chimiques et concerne surtout les agents chimiques les plus dangereux au premier rang desquels on note les produits classés CMR.

Agir Mag. : Qui est concerné par cette démarche ?
J.E : Une enquête réalisée sur le territoire en 2002-2003 a permis de déterminer le pourcentage de salariés actifs exposés aux produits CMR : 13,5 % étant concernés par une exposition aux produits cancérogènes, 1,1 % à des produits mutagènes, et 1 % à des produits toxiques pour la reproduction. 15% des salariés Français sont donc exposés à des produits CMR. Avec des secteurs d'activités qui sont bien évidemment plus concernées que d'autres, notamment l'industrie.

Agir Mag. : Quelles sont les procédures de prévention ?
J.E : Il existe des règles de prévention spécifiques définies dans le code du travail par les articles R231–56 à R R231–56-12, qui obligent les employeurs à remplacer les agents CMR dans la mesure où cela est techniquement possible, par une substance, une préparation ou un procédé qui n'est pas dangereux, ou qui est moins dangereux pour la santé des salariés. Au-delà du cadre réglementaire, la démarche de substitution est souvent difficile à mettre en œuvre car on ne dispose pas forcément du produit techniquement valable, c'est-à-dire suffisamment efficace pour assurer la substitution. Cependant, l'employeur peut s'appuyer sur des personnes ou organismes ressources, à commencer par le CHSCT, mais également le Service de Santé au Travail, dont l’avis sera central dans cette démarche.

Agir Mag. : Quels sont les avantages de la substitution pour l'entreprise ?
J.E : Le premier bénéfice que le chef d'entreprise tire de cette politique de prévention, c'est tout de même la préservation de la santé de ses salariés, dont il a la responsabilité, en termes de moyens et de résultats. Donc, en faisant une démarche de substitution, le dirigeant est forcément gagnant.