Du Document Unique au Document Utile !

Instauré en 2001, le Document unique d'évaluation des risques professionnels (DU ou DUER) est obligatoire dans toutes les entreprises. Accessible aux salariés, délégués du personnel, médecin du travail, inspecteur du travail et aux agents des organismes de sécurité sociale, il doit inventorier les risques professionnels et les conditions d'exposition aux dangers encourus par les salariés de l'entreprise. Enfin des actions de prévention et de protection doivent être proposées pour prévenir les risques et améliorer le confort des salariés. Ayant initié une étude qualitative du DU, la Fédération des acteurs de la prévention (FAP) estime qu’il faut sortir de la logique du « Document Unique » au profit du « Document Utile » ...

Agir Mag : Quelle a été la genèse de votre constat sur le DU ?
Vincent Giraudeaux : C’est le résultat d’un travail de longue haleine entamé en février 2016 à l’occasion des 25 ans de l’évaluation des risques et des 15 ans du DU. Nous avions organisé une rencontre où tout le monde pouvait participer et intervenir sur ces deux sujets en interpellant 4 grands témoins. Il est rapidement apparu que si le DU a permis d’enclencher la machine en matière de prévention des risques, il est loin d’être l’outil de prévention qu’il devait être pour prévenir les risques et améliorer la qualité de vie au travail des salariés. Les gens le font parce que c’est une obligation réglementaire… mais ils ne l’utilisent pas ! La FAP a alors entamé un Tour de France à Lille, Marseille et Lyon, puis organisé des Prevackthon^© car la prévention est avant tout affaire de communication et de rencontres sur le terrain. 

 

Agir Mag : Quel est l’objectif des prevackthons ?
V.G : Nous nous sommes inspirés des hackathons numériques, où des développeurs volontaires se réunissent pour faire de la programmation informatique collaborative, pour organiser des hackathons de la prévention des risques professionnels. La journée est structurée en 5 temps forts : un temps d’échange, un temps de réflexion, un temps de production, un temps de restitution et la remise de prix aux projets les plus innovants. Durant huit heures des acteurs de la prévention ont donc échangé, confronté, construit, imaginé et fait bouger les lignes pour proposer des actions opérationnelles innovantes. Ces dernières seront compilées dans un Livre blanc et soumises aux autorités pour faire évoluer les pratiques de la prévention en entreprise. 

 

Agir Mag : En quoi l’utilité du DU doit être remise en question ?
V.G : Les entreprises pensent à tort qu’en ayant réalisé leur DU, elles font de la prévention. En fait, elles y écrivent souvent qu’elles savent que leurs salariés sont exposés à des risques, mais elles ne font rien faute de temps ou de moyens. Une des équipes du premier prevackthon a par exemple relevé que « non intuitif », « déconnecté du réel », « impénétrable » et « décourageant » sont des qualificatifs parmi d’autres qui, malheureusement, « collent à la peau du Document unique » actuellement. Elle a aussi constaté deux barrières à ce qui devait être à l’origine un outil d’aide à la décision pour intégrer la prévention des risques sur l’ensemble des activités de l’entreprise.  D’un côté, un Document unique qui n’alimente pas le terrain et un terrain qui n’alimente pas le DU. De l’autre et de la même façon, un DU qui ne va pas servir à la mise en place de la stratégie de la direction et une direction qui ne va pas alimenter le Document unique…