Dernière mise à jour le : 13/12/2024
« La première marche de la reconnaissance, c\'est d\'exister en tant que personne. Etre reconnu, c'est être distingué. »
Voilà comment la philosophe et sociologue Dominique Méda, coauteur de Travailler au XXIe siècle, des salariés en quête de reconnaissance (Robert Laffont, 2015), résume l\'une des dimensions essentielles de tout travail.
Mais comment est vécue cette reconnaissance, aujourd'hui, par les actifs français ? De quelle manière les entreprises la prennent-elles en compte ? C\'est ce à quoi répond la vaste enquête menée au printemps dernier, auprès de 423 dirigeants et responsables RH, par l'Agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail (Anact), avec le cabinet d'avocats Fidal et celui de conseil en management Amplitude.
En voici les principaux enseignements.
Agir Mag : Quels sont les enseignements les plus inattendus ou emblématiques de cette enquête ?
Julien Pelletier : A notre grande surprise, seuls 9 % des salariés RH que nous avons interrogés se sont dits satisfaits des politiques de reconnaissance mises en place dans leur entreprise. Ils estiment que les dirigeants comme les représentants du personnel réduisent trop souvent la thématique de la reconnaissance à celle de la rémunération.
Ils regrettent de ne pas avoir le temps, l'opportunité, les moyens de creuser ce sujet afin de proposer des pistes d\'amélioration, de poser les vraies questions. Car la reconnaissance va bien au-delà des salaires.
Agir Mag : C'est-à-dire ?
J.P : On ne peut pas se sentir reconnu si on a l'impression que son travail n'a pas de sens. Or, dans un monde du travail qui se complexifie, donner un sens à ce que l'on fait est beaucoup moins évident.
Avant, les repères étaient clairs : le salarié se définissait par son ancienneté, son expérience, son poste, son métier, son statut. Aujourd'hui, tout est mouvant. Des nouveaux métiers se créent chaque jour, les parcours professionnels sont incertains, le travail est de plus en plus immatériel, cognitif, collectif, les objectifs sont contradictoires et changeants...
Dans ce contexte instable et complexe, où situer la performance ? Quels critères m'indiquent que je travaille bien ? Comment et pour qui mon travail fait-il sens ?
Agir Mag : Quelles pistes d\'amélioration ouvrent cette enquête ?
J.P : C'est via le dialogue professionnel, aujourd'hui insuffisant, que les processus de reconnaissance peuvent être améliorés. Echanger et débattre de ce qui fait la qualité du travail entre niveaux hiérarchiques, métiers, unités de travail, collègues permet de trouver des réponses à ces questions de fond sur la reconnaissance.
C'est ce qui fait par exemple tout l\'intérêt des actions du type "Vis ma vie" : un collaborateur passe quelques jours dans un autre service que le sien, pour partager le quotidien et l’activité d'autres équipes. De même, les salariés demandent plus de transparence, d’authenticité et de proximité dans leur rapport avec leurs managers.
Enfin, la nature de l’activité est en elle-même une manière efficace de reconnaître et donner de la valeur au travail accompli. Etre reconnu sans l’avoir exigé, simplement par une activité qui fait sens, sera toujours supérieur à une reconnaissance formelle.
Agir Mag : La reconnaissance est-elle un levier indispensable au bien-être au travail ?
J.P : Oui, bien entendu. Mais encore faut-il ne pas rabattre la notion de bien-être à une sorte de confort psychologique individuel.
Il s’agit moins de répondre aux besoins psychologiques des individus que de créer les conditions organisationnelles favorables à l’exercice de l’activité : autonomie, droit à l’erreur, responsabilisation, qualité des échanges, soutien managérial, objectivation des contraintes et des ressources…
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