Dernière mise à jour le : 13/12/2024
« La France a quarante ans de retard ! » Ce constat est celui de Laurent Delannoy, cofondateur, avec Laurence Vanbergue, d’Avencod, une entreprise adaptée des services du numérique. Créée en mars dernier à Nice, cette start-up sociale salarie aujourd’hui quatre personnes, dont une majorité d’autistes de « haut niveau ».
Une démarche encore bien rare en France ! Premier client de la jeune structure : Amadeus, fournisseur mondial de solutions pour l’industrie du voyage. Avencod s’est aussi lancé dans un nouveau projet : le développement de la plateforme Talents@Work, qui permet à des autistes à haut potentiel d’accéder aux métiers du numérique.
D’ici la fin de l’année, la start-up envisage d’embaucher cinq nouvelles personnes. « Notre démarche est avant tout sociale : elle consiste à amener les personnes autistes vers un emploi durable. Ce projet, nous ne l’avons pas construit seuls, reconnaît Laurent Delannoy. Nous avons été aiguillés par des associations (Atypiq à Juan-les-Pins, Autisme 13), par le groupe d’assurances santé Malakoff Médéric, par des psychologues, par l’hôpital… »
Comment mettre en place un cadre de travail adapté à ces salariés aux compétences exceptionnelles (capacité de concentration, souci du détail…), mais qui ne maîtrisent pas toujours les codes des relations sociales ? L’une de leurs difficultés réside en effet dans les échanges, verbaux et non verbaux, et dans leur « décryptage » : que signifie cette mimique sur le visage de mon interlocuteur ?
Pourquoi ce « bonjour », chaque matin ? Autant de signes que les autistes prennent beaucoup de temps à déchiffrer. « L’idée, c’est de dire aux salariés : apprends-moi la meilleure manière de fonctionner, explique Laurent Delannoy. Cela permet d’établir de bonnes pratiques. Par exemple, nos salariés n’utilisent pas de téléphone au bureau, mais communiquent avec les clients par chat, dans des salles spécifiques.
Les managers ne participent pas à ces réunions. Notre rôle est de réduire au maximum la pression que peuvent ressentir nos salariés, dont la recherche d’excellence peut être source de stress. C’est eux aussi qui, tous les quatre mois, évaluent la charge du travail à venir et planifient le programme. Une façon de garantir de la stabilité. » « Il y a des intelligences qui ne demandent qu'à être sollicitées.
Pourquoi tant de talents sont-ils gâchés ? Pourquoi des entreprises ne veulent-elles pas de tous ces gens qui ont des compétences tellement superbes ? » interrogeait en mai dernier Josef Schovanec, écrivain et philosophe porteur du syndrome d'Asperger, qui vient d'intégrer le cabinet de la secrétaire d'Etat auprès de la ministre des Affaires sociales et de la Santé, pour apporter des solutions sur l'insertion professionnelle des personnes adultes autistes… et, sûrement, rattraper ce retard français.
Pour aller plus loin
Aujourd’hui, on dénombrerait environ 600 000 autistes France. L’autisme de « haut niveau » ou Syndrome d'Asperger touche environ 300 000 personnes. La plupart ne sont même pas diagnostiquées et beaucoup sont sans emploi – ou ont un emploi très en-deçà de leurs aptitudes.
Pourtant, moyennant quelques connaissances simples sur le syndrome, il est possible d'employer ces personnes motivées, fiables, compétentes, le plus souvent fortement qualifiées, à pratiquement tous les postes de l'entreprise excepté ceux liés à la communication…
Pour en savoir plus, regardez Le Cerveau d’Hugo, film réalisé par Sophie Révil en 2012, et agrémenté des témoignages de jeunes et adultes autistes et de leurs proches.
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