Les pollutions de la santé
N°80 - Janvier / Février 2019
Aujourd’hui les pollutions et les maladies qui leur sont liées tuent plus que le tabagisme, la faim ou les catastrophes naturelles…
A l’occasion de son 10ème colloque annuel qui s’est tenu le 15 novembre 2018, Groupe Pasteur Mutualité (GPM) a décidé de s’attaquer à un problème de santé publique majeur et de mettre en avant les effets des polluants et des pollutions sur la santé. Tous les polluants seront abordés : atmosphériques, résidus de médicaments, perturbateurs endocriniens, visuels et auditifs…
La pollution cause 9 millions de décès par an dans le monde et représente 16% de la mortalité globale, bien davantage que le tabagisme, la faim ou les catastrophes naturelles. Comment prévenir les risques liés à la pollution dans notre environnement global et sur notre lieu de travail ?
3 questions à :
Docteur Michel Cazaugade
Président
Groupe Pasteur Mutualité
« Les polluants sont partout… »
Agir Mag : Votre récent colloque désignait les pollutions comme un enjeu vital de santé publique. Quel est le niveau d’urgence ?
Michel Cazaugade : Nous sommes confrontés à une crise écologique et climatique, dont nous connaissons de mieux en mieux les impacts. S’emparer de ce sujet, avec un regard de préventeur en santé, fait donc partie de notre mission. Les pollutions ont de multiples origines : chimiques, bactériologiques, nucléaires, thermiques, hormonales, visuelles ou auditives. Le risque est partout et constitue une menace existentielle pour chacun d’entre nous. Médecins, chercheurs, vétérinaires, pharmaciens, agriculteurs se mobilisent pour caractériser les émissions de polluants et en comprendre les effets.
Notre colloque avait pour ambition de faire un état des lieux pluridisciplinaires de ces travaux, à l’échelle européenne. Nous, professionnels de la santé, avons une responsabilité particulière dans ce domaine, où la prévention est déterminante pour éviter des maladies et réduire le nombre de décès liés aux polluants qui nous entourent, où que nous soyons. La pollution de l’eau est significative à cet égard : avec l’augmentation de la démographie et la pénurie d’eau douce liée aux changements climatiques, la réutilisation des eaux usées va croissant, pour fabriquer de l’eau potable ou irriguer des aliments. Les risques de contamination sont inquiétants pour l’avenir de la santé et la fiabilité des filières de traitement. C’est un sujet d’alerte majeur pour les scientifiques.
Enfin, si l’on regarde de plus près la pollution des résidus de médicaments, héritage du développement de la chimie depuis les cinquante dernières années, elle imprègne l’environnement de ses effets biologiques, en rejoignant l’écosystème aquatique, avec des impacts délétères sur notre santé. « L’environnement nous a fait devenir ce que nous sommes », explique Rémy Slama, chercheur à l’INSERM (Institut National de la Santé et de la Recherche médicale) à l’occasion du colloque, « nous sommes entrés dans une ère où l’influence de l’homme sur l’environnement est majeure ; c’est l’ère anthropocène ».
Agir Mag : Les animaux semblent jouer un rôle de « sentinelle » dans ce domaine ?
M.C : C’est en effet le cas, les animaux sont un intermédiaire précieux entre la nature et l’homme. Nous travaillons en étroite collaboration avec un réseau de vétérinaires, qui étudient le comportement de certains animaux comme les abeilles, les poissons, les oiseaux, les animaux de compagnie et de reproduction, notamment par rapport au risque chimique.
Les truites de Marseille sont par exemple utilisées comme sentinelles de la qualité de l’eau à Marseille alors que les rennes de Laponie, mammifères herbivores, ont été de redoutables indicateurs du risque physique nucléaire après la catastrophe de Tchernobyl. De même, ce sont les travaux d’inoculation réalisés sur les souris et les brebis qui ont permis de démontrer la transmissibilité de la maladie de Creutzfeldt-Jakob. L’étude des zoonoses est un secteur de pointe pour nous aider à combattre les risques des polluants sur notre santé.
Agir Mag : Et au travail ?
M.C : Les polluants sont partout, dans l’atmosphère ou dans l’eau, mais certains d’entre eux concernent plus directement le quotidien des personnes exposées à des risques de pollution plus précis, comme la pollution visuelle ou auditive, trop souvent méconnues. L’humain est un être d’activité diurne qui se régénère la nuit, grâce à l’obscurité.
Aujourd’hui, exposé à de nouvelles sources de lumière artificielle, diffusées par les écrans de télévision, d’ordinateurs ou de smartphones, mais aussi par les enseignes ou l’éclairage urbain, le tissu rétinien subit des effets d’onde toxiques qui provoquent des myopies précoces, l’obésité ou des troubles du sommeil et de la concentration. Pour ce qui est de la dangerosité du bruit, omniprésent, il est avéré que les durées d’écoute trop intenses peuvent entraîner une destruction quasi irréversible des cellules ciliées de l’oreille interne. Pour protéger son audition, il faut guetter ce qui a disparu, et s’inquiéter lorsque l’on constate une altération unilatérale de l’audition.
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